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L’évaluation à 360 degrés … à l’envers


L’évaluation à 360 degrés est une méthode ancienne, déjà utilisée dans l’armée américaine lors de la grande guerre, et expérimentée dans les années 1950 par Esso. Elle a connu son heure de gloire au cours des années 2000 en France. L’évaluation à 360° repose sur une évaluation par les différentes catégories d’acteurs avec lesquelles la personne évaluée interagit (pairs, subordonnées, clients, fournisseurs, supérieurs, etc.) combinée à une auto-évaluation. Cette méthode vient rompre avec une tradition ancienne et une philosophie gestionnaire conventionnelle selon laquelle l’organisation est structurée de façon verticale et les collaborateurs placés « sous » l’autorité d’un manager. Les collaborateurs étaient jusqu’alors logiquement évalués par leur supérieur hiérarchique et non l’inverse. Le développement du management par les compétences, de l’organisation apprenante, du culte de la performance ou de la structure « plate » a favorisé la diffusion d’approches alternatives et notamment de l’évaluation à 360 degrés. La culture du feedback positif qui a pris son essor depuis quelques années a eu tendance à supplanter l’évaluation à 360° en remédiant à certaines de ses limites, notamment la lourdeur du processus d’évaluation (long, il mobilise de nombreux acteurs) et sa temporalité (l’évaluation est ponctuelle et peu fréquente). Le feedback positif est une pratique plus souple, rapide et instantanée.

Faut-il pour autant remiser l’évaluation à 360 degrés au rayon des méthodes de management désuètes ? Peut-être pas si l’on considère le potentiel de la méthode dans un autre registre : l’aide à la composition d’équipes, aux profils équilibrés et complémentaires.

L’évaluation fait traditionnellement référence à des méthodes et outils dont la finalité est de mesurer ou, comme le précise le Larousse, « apprécier la valeur ». La vocation originelle de l’évaluation à 360° est bien d’apprécier les compétences d’un manager au sein de l’organisation et ses aires de développement personnel possibles. Au-delà des résultats individuels et des évaluations métriques classiques, elle replace l’individu dans un collectif élargi, en interaction avec une multiplicité d’acteurs, en capacité d’apprendre et d’interagir avec les autres selon la place qu’il occupe. Néanmoins, cet outil d’évaluation peut avoir une autre destination dans une version « augmentée », utile aux départements des ressources humaines ou managers confrontés à des arbitrages dans la composition des équipes. Questionnement classique, souvent source de dilemmes pour le recruteur ou manager : comment le candidat va-t-il s’intégrer dans l’équipe ? Au-delà des compétences techniques, sera-t-il compatible avec le style de management ou le profil des autres membres de l’équipe ? L’évaluation à 360 degrés peut ainsi être utile pour qualifier les profils des membres de l’équipes et aider au recrutement de collaborateur compatible avec ces profils. Cette approche favorisera l’intégration des nouveaux-venus, chacun ayant d’emblée une vision assez nette des rôles des uns et des autres.

Dans cette perspective, l’évaluation à 360° présente certaines proximités avec les approches consistant à caractériser les types psychologiques à l’instar des travaux du MBTI (Myers Briggs Type Indicators), par exemple. Chaque acteur, selon ses préférences, est associé à une fonction dominante et auxiliaire. Plus généralement, ce type de méthodes renvoie aux approches fondées sur la diversité des styles cognitifs. Ces approches peuvent constituer un levier intéressant à exploiter au sein d’organisations fortement hiérarchisées et bureaucratiques. Elles constituent alors des forces de rappel de certains fondamentaux du management : le manager se veut un acteur de facilitation de coopérations, il n’est pas au-dessus du collectif mais fait partie intégrante d’une situation partagée. Les réseaux sociaux professionnels qui se sont développés ces dernières années peuvent néanmoins constituer une alternative intéressante pour les recruteurs dans le cadre de recrutements externes. Ces réseaux sociaux professionnels ont le mérite de l’instantanéité et de la souplesse via les recommandations qui contribuent à qualifier et caractériser le profil du candidat.

Article écrit sur la base d’un travail réalisé par Johan Guyader et Camille Leroy, Lauréats du School Challenge de L’observatoire de l’innovation managériale 2019 en Master 1 Assurance et gestion de patrimoine de l’Université Rouen Normandie

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