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L'essor de la GPEC

Née il y a plus de 50 ans, la Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences (GPEC) constitue le socle des politiques ressources humaines de très nombreuses organisations, publiques comme privées. L’essor de la GPEC est à relier aux efforts entrepris par les directions ressources humaines pour asseoir leur légitimité. L’alignement de la GRH à la stratégie, l’accompagnement ‘à froid’ des restructurations, forment ainsi une rhétorique puissante sous-tendant la GPEC. Les premières démarches, inspirées par les progrès de la recherche opérationnelle, se développent dès les années 1960 et se résument à une gestion prévisionnelle à long terme des effectifs. Prenant acte de l’échec des modèles adéquationnistes, fondés sur la prévision, les décennies 1970 & 1980 sont marquées par la volonté des directions ressources humaines de s’extraire d’une gestion de masse pour développer une GPEC davantage centrée sur les personnes (annonçant en cela l’individualisation croissante des pratiques de GRH). Les revues de carrière, la formation, l’évaluation des compétences et la gestion des hauts potentiels se développent dans une optique de fidélisation des cadres. Les décennies 1990 & 2000 placent définitivement la compétence au cœur des démarches GPEC : la prévention se substitue à la prévision, l’employabilité des salariés devient un enjeu essentiel, de même que l’organisation du travail comme creuset du développement des compétences (en témoigne à l’époque le succès du concept d’organisation apprenante, dont la notion d’entreprise libérée n’est que l’avatar contemporain). Parallèlement, la GPEC s’institutionnalise et s’ancre progressivement dans le droit du travail, mouvement qui trouve un point d’orgue avec la loi de cohésion sociale de 2005, instaurant l’obligation triennale de négociation sur la GPEC. La loi de sécurisation de l’emploi de 2013 étendra de façon significative les thèmes de négociation obligatoires, notamment aux conditions de la mobilité géographique ou professionnelle interne, aux objectifs du plan de formation, aux moyens déployés pour dé-précariser l’emploi, aux conditions d’information des entreprises sous-traitantes sur les orientations stratégiques de l’entreprise. Les prolongements actuels de la GPEC s’orientent dans deux directions : 1) la volonté de penser la GPEC dans un cadre élargi à l’échelle du territoire, et non plus seulement à l’intérieur des frontières de l’entreprise (d’où l’émergence de l’acronyme GTEC pour Gestion Territorialisée des Emplois et des Compétences) ; 2) l’intégration plus étroite des démarches de GPEC et de RSE, la GPEC étant vue comme l’opportunité de remédier à des déséquilibres internes en priorisant les actions GPEC sur certaines populations sensibles (bas niveaux de qualification et seniors en particulier).

Avis de l’Observatoire : la prégnance au fil du temps de la GPEC au coeur de l’instrumentation de GRH tient selon nous à deux caractéristiques majeures :

- son statut d’outil-pivot, renforçant la cohérence interne des pratiques de GRH (recrutement, évaluation, formation, mobilité, etc.) via l’analyse systématique des écarts entre les compétences requises par les métiers et les compétences détenues par les salariés ;

- sa capacité à aligner la politique RH sur la stratégie d’entreprise à travers notamment la réflexion prospective sur les métiers ‘sensibles’ : métiers menacés / fragilisés, porteurs ou en croissance, émergents, à fort taux de renouvellement, en tension (pour lesquels l’offre de main d’œuvre est réduite sur le marché du travail), etc.

Toutefois, les promesses de la GPEC ne semblent pas s’être pleinement concrétisées. La projection des besoins en ressources humaines reste un exercice complexe, entaché d’incertitude, qui suppose une vision stratégique explicite et un effort de prospective. Par ailleurs, si la GPEC n’est pas l’antichambre des PSE, elle n’en est pas davantage l’antidote. Pratique éminemment contingente, on reproche également aux démarches GPEC un déficit de contextualisation et une inadéquation aux caractéristiques et enjeux des PME. De fait, l’enjeu semble moins résider dans la maîtrise d’une instrumentation de GPEC, désormais bien connue et stabilisée (référentiels, cartographies des métiers, observatoires des métiers, etc.) que dans la capacité à travailler l’appropriation de ces démarches notamment par les managers de proximité.

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