Des systèmes pour remplacer l'expert ?
MYCIN est un des premiers systèmes à base de connaissances mis au point dans le courant des années 1970 par le biologiste et informaticien américain Edward H. Shortliffe. MYCIN permettait en particulier d’identifier les bactéries pouvant causer des infections sévères et recommandait les antibiotiques ainsi que les posologies adaptées. [La figure ci-après présente son interface en 1974.]
L'interface de MYCIN en 1974 (Shortliffe, 1976, p. 48)
Un dialogue machine-utilisateur affinait les résultats en fonction des données saisies. D’abord cantonnés aux laboratoires, les systèmes à base de connaissances ont ensuite investi les entreprises dans le courant des années 1980, à l’ère des « systèmes experts », applications industrielles des systèmes à base de connaissances. Dans une perspective de rationalisation de la conception et de pérennisation de l’activité industrielle au-delà de la présence des experts, de nombreuses opérations de capitalisation des connaissances ont alors été mises en place en reposant sur de tels systèmes. En France, pour des chercheurs comme Michel Gondran les algorithmes et données stockées en mémoire assuraient alors à l’entreprise une forme de mainmise sur l’expertise de ses employés, alors que pour d’autres comme Michel Grundstein ces systèmes ont des limites qu’il faut connaître et qui induisent des formes particulières de management des individus et de leurs connaissances.
Avis de l’Observatoire : dans les années 1990, deux ombres sont apparues sur le tableau des systèmes à base de connaissances. La première, technologique, concerne l’évolution rapide des artefacts et des matériaux qui a engendré une obsolescence accélérée de bases sur lesquelles reposaient ces systèmes, les rendant inadaptés peu après leur mise en production. On pense par exemple aux calculs de tuyauteries chez EDF et à l’évolution de la résistance des matériaux due à la fabrication de nouveaux matériaux composites. La seconde, démographique, concerne le vieillissement des populations occidentales qui a parfois mis en péril la mainmise visée par l’entreprise sur l’expertise de ses employés, notamment au moment de leur départ à la retraite. Une fois les experts partis, l’entreprise dispose de peu de moyens pour s’assurer de l’interprétation qui va être faite des résultats fournis par le système. La validité du sens qui est donné aux informations diffusées, aussi bien que sa stabilité d’un utilisateur à l’autre ne sont pas assurées.