Approches post coloniales en management
Les approches post-coloniales se sont épanouies dans les universités australiennes, britanniques et nord-américaines depuis 1990 à partir de plusieurs sources différentes (littérature comparée, sciences politiques, anthropologie et sociologie post-moderne,etc) avec des auteurs clés comme Edward Said, Yves Mudimébe, Homi Bhabha, Ranjit Guha, etc. Le mot post-colonial revient moins au constat empirique que les empires coloniaux appartiennent au passé qu’à un projet de dépassement par la critique de ce qui survit aujourd’hui de ce passé dans les manières de voir et les discours qui l’expriment. Dans la littérature managériale, les approches postcoloniales rejoignent les recherches critiques en management dans une interrogation quant aux rapports qu’entretiennent les pratiques, les techniques, les discours du management et les connaissances produites sur/pour celui-ci, avec la société. Dans cette perspective, la globalisation et l’hégémonie du modèle américain sont vues comme une colonisation de savoirs et de la représentation de ce que c’est qu’un bon management (Frenkel, 2008). Le courant post-colonial en management a pour objet de déconstruire l’universalité auto-proclamée de la littérature managériale occidentale et notamment américaine (Alcadipani, 2015). L’enjeu est de traquer les traces de l’entreprise coloniale dans la production du savoir et dans sa capacité à bloquer l’émergence de modèles alternatifs de savoir (Prasad et al., 2003). Le projet politique est de favoriser la production intellectuelle qui vient du Sud.
Avis de l’Observatoire : Les approches post-coloniales ont contribué à l’analyse des liens entre colonialisme et industrialisation, la convergence entre les idéologies coloniales et managériales ou encore les similitudes entre les régimes coloniaux et les régimes internationaux comme systèmes de contrôle à une échelle mondiale. Elles ont également enrichi l’analyse des processus d’hybridation dans le transfert des pratiques de gestion Nord/Sud et leur impact sur la construction des identités aussi bien professionnelles qu’organisationnelles (Yousfi, 2014). Cependant, si les études postcoloniales ont permis de réhabiliter les rapports de domination dans l’analyse des relations entre le Nord et le Sud, beaucoup reste à faire pour comprendre la manière dont le discours dominant impacte concrètement les pratiques et la manière dont les acteurs locaux résistent et réinventent les méthodes de gestion qui leur sont imposés.